• Chapitre 06 : Le magicien et le dragon

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    Aldaron : 

         Lorsqu'elle m'avait repoussé avec colère, c'était comme si mon coeur avait arrêté de battre pendant quelques secondes. Sam m'avait regardé les yeux tristes, surpris, et était parti rattraper Risia. Au lieu de rester cloué sur place, je me suis réfugié dans un coin entre deux maisons. Pour la première fois, j'a pleuré énormément, pas parce que j'avais perdu quelqu'un mais parce que je me sentais coupable d'aimer quelqu'un de différent. Plus tard, après avoir fini de pleurer comme un enfant, je me levai tout penaud, main contre le mur. Je levai les yeux et je vis Sam me regardant colérique. Il portait Risia dans ses bras, endormie, la chaîne d'argent que je lui avais offerte pendait autour de son cou.

    « Elle a beaucoup pleuré, murmura-t-il. 

        Je vis aussi Celebrimbor derrière eux, surveillant le moindre danger avec un petit reptile dans les bras qui ne cessait de mordre ses doigts avec ses gencives. Je vis le ciel devenir sombre. J'espérais que la bataille d'aujourd'hui se terminerait rapidement. 

    ─ On va rejoindre la bataille, tout homme doit le faire. Mais toi, je t'ordonne de rester avec Risia, ajouta le petit Prince aux yeux d'acier.

    ─ Mais...

    ─ J'espère que vous vous réconcilierez », finit Sam.

       Puis celui-ci fit apparaître ses oreilles félines et sa queue. Il déposa la fille sourde sur mes genoux, et me fit un clin d’œil. « À partir d'aujourd'hui, nous sommes des alliés, mais je serai ton rival quand il s'agira d'elle. Je pense que je suis sous son charme », ricana-t-il. Il sauta au dessus pour monter sur le toit. Celerimbor sortit son épée avec aisance et la pointa vers moi.

    « C'est un ordre », me lança-il.

        Je lui souris et il fit la même chose en retour avant de partir. Je fis asseoir Risia qui se réveilla. Elle recommença à sangloter, je mis ma main sur sa joue, lui demandant de se calmer en lui disant que j'allais bien. Elle m'enlaça, mon cœur battait la chamade. Puis elle se remit à pleurer de plus belle. « Ne pleure pas ! » Je mis mes bras autour d'elle et regardai le ciel. Il commençait à pleuvoir très peu, puis tout à coup il y eut une averse. Comme si cet averse montrait les peines de cette jeune fille. Je fis lever Risia et lui ordonnai de me suivre sans me lâcher la main. Je pris sa main avec une telle douceur qu'elle fut surprise. Avant de sortir du coin, je regardai la cour pour voir s'il n'y avait personne. Je courus, suivi de Risia, main dans la main.

    **

    Risia : 

        Aldaron ne me lâchait plus la main, comme de peur de me perdre de vue. J'ai accepté sans broncher. Tout à coup une hache sanglante passa entre nous de justesse. Aldaron me lâcha et se mit devant moi, bras écartés, oreilles en arrière. « Vous ne passerez pas ! » [Humour : référence à Gandalf !!] .
         Un groupe d'orques s'avançait excité vers nous, également poursuivi par un groupe de soldats aux armures représentant un aigle argenté, dont certains étaient sur des chevaux. Je secouai Aldaron, paniquée, lui criant que nous devions fuir. Décidée à réagir en essayant de faire apparaître une de mes capacités, je me mis devant lui, misant toutes les chances sur ma force. Il s'énerva. Je joignis mes mains comme si je faisais une prière et je me concentrai. Un cercle lumineux, où étaient inscrits de nombreux mots dans une langue étrangère, apparut sous mes pieds. Mes cheveux flottaient. Aldaron recula, émerveillé. Une fine couche blanche opaque se transforma en bouclier autour de mon ami et moi. Lorsque le groupe d'ennemis s'approcha, je séparai mes mains. Le bouclier magique disparut telle une explosion et fit valser les ennemis qui crièrent de douleur ou de surprise. Le groupe de soldats argentés prit une position de défense. Fatiguée, car je manquais d'expérience, j'allais m'agenouiller lorsqu'Aldaron me prit dans ses bras pour éviter que je tombe. Il me demandait comment je savais contrôler une partie de mes pouvoirs. Je l'ignorai.

    « Tu es vraiment... une Élue ! 

    ─ A...Aldaron...

    ─ Tout le monde t'appelle "Humaine", "Élue", "Fille Perdue"...

    ─ C'est quoi une fille perdue ? lui demandai-je, essoufflée.

    ─ Une fille qui n'a plus de famille ou qui vient vivre dans un autre Monde...

    ─ Et tu m'appelles comment ?

    ─ Risia », me sourit-il.

         Après la discussion, Mélodie courut vers nous et m'aida à marcher. L'eau ruisselait sur son amure de bronze. Ses cheveux étaient plaqués sur son crâne. «C'est fini », m'annonça-t-elle. « Ils sont partis, et on ignore la raison ». Sam apparut comme s'il venait du ciel, me prit les bras, tout content : 

    « Bravo, ils sont partis, grâce à toi ! 

    ─ Sam, ils sont encore là, mais ils ne demandent plus de renfort. La victoire est à nous », rectifia la guerrière blonde.

        Le Prince des arbres fusillait l'homme-chat du regard. Celui-ci lui rendit par un sourire de défi. Je me demandai ce qu'ils cherchaient à avoir. Son œil saignait énormément. Inquiète, je m'approchai de Sam. Celui-ci me rassura en me disant qu'il allait bien, avant de tomber lourdement dans mes bras. Le groupe paniqua. On nous ramena dans une auberge, les chambres nous étaient offertes. Sam fut emmené aux soins. Je cherchai Celebrimbor et Aldaron me confirma qu'il était également aux soins, inquiet. Il semblait qu'il venait d'apprendre une mauvaise nouvelle mais il n'osa pas l'aborder. Je pris la même chambre que Mélodie et Stella. Stella était partie pendant la bataille s'occuper de quelque chose mais elle n'avait pas voulu me dire de quoi. Je regardai par la fenêtre, la pluie tombait encore. La nuit glaciale arrivait en douceur. C'était bientôt l'heure du repas. J'étais impatiente, car c'était la première fois que je partageais le repas avec d'autres personnes. Mélodie sortit de sa douche, serviette autour d'elle :

    « Il n'y a rien de mieux qu'une bonne douche après la pluie ! 

    ─ Mé...Mélodie ?

    ─ Quoi ?

    ─ Pourquoi ces monstres ?

         Elle essaya de comprendre ma question, puis me répondit :

    ─ On l'ignore. Peut-être que quelqu'un s'est fait passer pour un allié...Mais...

         Puis elle s'arrêta. On aurait dit qu'elle avait peur que je ne comprenne pas ce qu'elle m'expliquerait. Voulant changer de conversation sur un coup de tête, je demandai :

    ─ C'est quoi ton nom ?

    ─ Tiens, pourquoi cette si soudaine question ? », lis-je sur ses lèvres enjouées.

        Parce que je voulais mieux connaître les gens qui m'entourent. Le père de Celebrimbor avait raison : c'est ici ma nouvelle vie, même si certains ne m'aimaient pas. Ils ne m'aimaient pas parce que j'étais différente. Mais ma façon d'être différente était d'être moi-même, comme me l'avait précisé ma nourrice chez les Humains. Mélodie me conseilla de sortir me promener dans les couloirs le temps qu'elle se change. J’acquiesçai et pris bien le temps de fermer la porte derrière moi. 

    **

    Aldaron : 

         Inquiet et me rongeant les ongles, je courus sans cesse dans les couloirs du château pour enfin arriver dans la salle de soins. J'ouvris la porte violemment : 

    « Sire, où est Celebrimbor ? Et le chat ?! »

        Je vis le petit prince allongé sur le lit, endormi, son visage marqué par la douleur. L'homme-chat se tenait à côté de lui, dans un autre lit. Une servante observait la respiration de Celebrimbor. Je m'approchai, honteux d'avoir crié, et regardait le visage de Sam. Un gros pansement mouillé et rouge était posé sur son œil gauche. Celui-ci ouvrit son œil droit, et me sourit. Il me tendit la main, je la serrai.

    « Bonjour, Prince Aldaron, m'adressa-t-il.

    ─ Heureux que vous soyez sauf, Sam. Votre œil va bien ?

    ─ Non, j'en souffre encore. Le plus important, c'est le petit voisin.

        Je me retournai vers le garçon endormi, agenouillé.

    ─ Désolé.

    ─ Pourquoi t'excuses-tu ? Ce n'est pas de ta faute, ce sont ces monstres qui nous l'ont fait. Tant qu'on est en vie, tout va bien, murmura Sam, après un soupir.

    ─ Je n'ai rien fait...

    ─ Nous devons protéger les dernières races, tu comprends ?

    ─ Monsieur, vous devez sortir, interpella la servante.

    ─ O.. oui...

    ─ Ah... je voulais juste vous demander... comment connaissez-vous ? me demanda-t-elle.

    ─ C'était dans le passé, je l'ai connu quand il était adolescent, lui répondis-je.

    ─ Hé, ne déballe pas ma vie comme ça ! s'exclama l'homme chat. On cherche à draguer une autre maintenant ?

    ─ Ou tout simplement pour te mettre dans la honte », lui répliquai-je.

        Sam me regarda fâché, mais m'offrit un sourire de défi. Je lui souris à mon tour. Je fis une faible révérence par respect, devant les victimes puis partis. Je longeai les couloirs en frottant mon épaule contre le mur, inquiet. Je me cognai contre quelqu'un et levai les yeux. Je croisai des yeux bleus purs comme le ciel, sans marque de désespoir, de haine et de douleur.

    « Risia, lui souris-je.

        Elle me prit le bras, inquiète.

    ─ Al...daron, tu vas bien ? Tu veux... te reposer ?

    ─ Non, je ne sais plus quoi faire.

    ─ Oh. Je suis toute seule, promène-toi avec moi, murmura-t-elle. 

    ─ Ce n'est pas ça...

    ─ Qu'est-ce ?

    ─ Nos amis...

       Elle s'affola et me demanda ce qui s'était passé puisqu'elle ne les avait pas vus depuis que nous avions couru sous la pluie et que nous étions rentrés en toute sécurité.

    ─ Sam est devenu borgne, le Seigneur d'argent a disparu, Stella également, et... Celebrimbor...

    ─ Celebrimbor ?!

    ─ Il ne parle plus, il ne répond plus, ne se réveille plus. La Mort plane au dessus de lui. »

    **

    Risia : 

         Nous marchâmes longtemps. Mon cœur me faisait mal, à l'idée de perdre des proches à nouveau. Et je me demandai si le petit animal que j'avais recueilli se sentait bien parmi les servantes qui s'occupaient de lui. Nous croisâmes une vielle femme bien coiffée, avec une robe beige. 

    « Oooh ! s'étonna-t-elle en m'observant. C'est donc elle ! 

    ─ Demoiselle, ce n'est pas le moment, nous avons besoin de silence et d'espoir, coupa Aldaron.

    ─ Est-elle l'humaine Élue ?, ricana-t-elle en jouant avec un éventail pour se rafraîchir.

    ─ Demoiselle..., répliqua mon ami, en fronçant les sourcils.

    ─ Ne le touche pas, me dit-elle avec un regard ténébreux.

        Elle s'avança vers moi et nous sépara avec violence.

    ─ Ce n'est pas parce que tu es une Élue que tu te permets de te rapprocher et de toucher notre sang royal ! En plus, handicapée ! C'est écœurant ! 

    ─ Demoiselle ! stoppa Aldaron avec rage en lui confisquant l'éventail.

    ─ Mais Môsieur ! Quelle rage ! Pourquoi protégez-vous un déchet ? continua-t-elle sans aucune position de défense et avec sérénité.

    ─ Demoiselle, sachez que...

    ─ Madame, m'exclamai-je.

    ─ Oh, tu répliques ? me répondit-elle.

    ─ Ça suffit, continuai-je.

    ─ Vous n'avez pas à me donner des ordres, rigola-t-elle après avoir fait les gros yeux. Surtout pas un déchet comme vous.

    ─ Risia, c'est une personne importante, ne réplique pas s'il te plaît, me dit Aldaron par la pensée.

    ─ Importante ou pas, je refuse qu'on me traite ainsi ! criai-je.

    ─ Risia ! 

    ─ Non ! criai-je encore de plus belle, larmes aux yeux.

        Puis je reçus une gifle sur la joue. Je regardai la femme, main levée retenue par le Prince des Arbres qui la regardait avec rancune. Mon cœur faisait mal, mais à côté j'étais fière : je ne m'étais pas laissé faire. Je ne voulais plus que les gens me regardent de haut. La femme bougea son bras pour se libérer. Aldaron ne la quittait pas du regard jusqu'à qu'elle disparaisse de vue. Il se retourna et me gronda :

    ─ Pourquoi as-tu répliqué ?! Je t'avais dit que c'était une personne importante ! C'est la tante du petit prince argenté ! 

    ─ Aldaron ! lui répondis-je, larmes aux yeux, je me défendais !

        Il m'observa longtemps, avec des yeux qui brillaient, droit dans les yeux, puis se détendit.

    ─ Tu as raison. Mieux vaut avoir moins de personnes qui nous entourent mais en qui nous avons confiance et qui nous aiment. 

        Je le regardai, en poussant un sourire forcé. Puis un instant plus tard, il tendit sa main et caressa le pendentif qu'il m'avait offert. Il prononçait des mots que je ne compris point. Lorsqu'il leva le regard vers mon visage, mon cœur battit la chamade ; j'admirai à nouveau son visage, comme lorsque nous étions dans le désert après la chute de l'aigle. Je me mis à plonger dans son regard. Pourquoi étais-je attirée ? Il se mit à rire doucement. 

    ─ Ton regard vaut mieux que mille mots, ajouta-il, main devant son nez, cachant sa peau devenue rosée. Je disais juste que tu étais une jolie fille courageuse. »

        Je sentis les battements de mon cœur monter jusqu'à mes oreilles, je ne pouvais plus prononcer un mot. Essayait-il de me réconforter ? Mon nez commença à couler, suivi de mes larmes qui débordaient à flot. « Tu pleures encore ?!» Après un soupir, le prince passa sa main dans mes cheveux et posa son front sur le mien. J'entendis des pensées : « Tu sais, tu es forte en réalité. Bien plus que nous. Défends-toi si nécessaire, et protège ceux que tu aimes ». Il se décolla. Il garda sa main autour de mon cou. Nous nous regardâmes longtemps. Je souris, lui de même. Il tentait d'approcher son visage, et je ne sus pourquoi. Mon cœur ne cessait de battre si fort. Puis tout à coup, il semblait se réveiller d'un rêve, me regarda un peu gêné. Il observa ailleurs pendant un long moment, puis se mit à bien articuler pour que je comprenne : 

    « Risia, passons à autre chose ; quel est ton nom de famille ? »

        Je fis les gros yeux. Me poser cette question à un tel moment ! Je lui répondis "Povfiy". Il me regarda longtemps, puis sourit tout doucement. "Tu l'aimes ?"

    « Aimer qui ? demandai-je.

    ─ Ton nom de famille.

    ─ Pas.... vraiment. Les gens.... autour de moi... se moquaient... de mon nom...

    ─ Veux-tu le changer ?

    ─ Est-il possible ?! m'exclamai-je.

    ─ Oui. Celeborn voulait que tu fasses une nouvelle vie parmi nous, donc une nouvelle identité. Il paraît que ce sont les cieux qui lui ont ordonné cela.

           Une grande joie monta en moi. Je ne pouvais pas y croire. Étais-je la seule Élue à vivre cela ? Mais je changeai le sujet de conversation.

    ─ Je veux d'abord trouver un nom pour le petit.

    ─ Tu veux ce reptile ? 

    ─ Oui.

    ─ Mais, tu sais que ce n'est pas un reptile banal. On m'en a parlé...

    ─ Quoi ? m'exclamai-je. Qu'est-ce que c'est ?!

    ─ C'est un dragon.

    - Ah... répondis-je, perdue dans les pensées.

        Mais les dragons n'existaient pas ! Que me racontait-il ? Les dragons étaient des êtres issus des mythes...

    ─ Réfléchis-y bien. Il va être difficile de s'en occuper, mais je t'aiderai...

    ─ Pourquoi veux-tu m'aider ? demandai-je, curieuse.

    ─ Parce que... hem... je suis ton ami ! » murmura-t-il, joues roses à nouveau.

        Je souris. Nous passâmes à côté de la salle des soins. Je demandai à Aldaron si on pouvait rendre visite à nos amis. Il baissa les yeux. Je n'ajoutai pas un mot. Nous ne bougeâmes plus. Pendant un long moment, j'attendais qu'Aldaron dise quelque chose. Puis ses oreilles frémirent. Il leva les yeux, et j'aperçus Mélodie, main sur la hanche, qui nous annonça que le repas était déplacé d'au moins une demi-heure. Puis elle vint et me frotta la tête. Lorsqu'elle vit la salle de soin, son sourire disparut. Les oreilles d'Aldaron baissèrent, comme un animal triste. Je le vis mettre la main sur ses yeux, comme pour cacher ses larmes. Touchée, je lui pris sa main. C'était la première fois que je le voyais aussi inquiet, comme il l'a été pour moi, et je ne savais pas pourquoi. Mélodie poussa un soupir et ouvrit la porte. Une femme habillée de tenue de soin sortit en souriant tristement. Mélodie nous laissa la porte ouverte et vint s'installer près des lits. Je vis sur le poignet d'Aldaron le même pendentif que je portais autour de mon cou. Je le regardai, je fis baisser sa main. Je serrai ma main autour de son pendentif. Aldaron ne me quitta plus du regard, et attrapa ma main. Il s'apprêtait à me dire quelque chose, mais abandonna.

    **

    Risia : 

         Sam était réveillé, dans son lit et dos contre le mur. Lorsqu'il me vit, avec un gros pansement sur son œil gauche, il me sourit. Aldaron s'assit sur un lit vide, à côté de l'homme-chat. Mélodie fit la même chose. Je cherchai le petit garçon aux cheveux gris.

    « Risia, cherches-tu Celebrimbor ?» semblait répéter Mélodie, après m'avoir fait plusieurs gestes. 

       J’acquiesçai. Je m'approchai et s'assit sur le lit de Sam. Celui-ci me dit qu'on avait déplacé notre ami pour surveiller son état qui s'empirait. Je baissai les yeux.

    « On ne peut... expliquer... demandai-je en bafouillant.

    ─ Et bien... commença Mélodie.

    ─ C'est un Kodok qui... continua Aldaron.

    ─ Risia, m'appela Sam par un geste.

         Je le regardai pour me concentrer à la lecture labiale.

    ─ Tu vois, les montres ? Ce sont des Kodoks. K,O,D,O,K, fait-il, en mimant des lettres lorsqu'il épelait.

    ─ Oui ?

    ─ L'un d'eux a pris Celebrimbor par surprise, et l'a envoyé conte un mur.

        Il fit un geste d'une main présentant un individu. Avec l'autre main, il fit mine de prendre"l'individu" et l'envoyer contre le mur derrière lui.

    ─ Comme si on frapperait un poisson contre une roche, finit-il.

         Je ravalai ma salive.

    ─ Ce n'était pas la peine de détailler, grommela la guerrière.

     

    ─ Et toi ? demanda Aldaron.

    ─ Moi ? Coups d'épée, et vlan... »

         Il refit des mimes ; il utilisa son bras pour montrer l'épée, et avec le bout de ses doigts, il fit mine de trancher son œil blessé.

         J'ajoutai que je sortais, car je ne me sentais pas bien. Sam s'excusa, insista que je reste, mais je fis le contraire. Je sortis seule de la pièce et une main ganté se posa sur mon épaule. La guerrière de bronze se mit devant moi, et me dit que je dois continuer d'être courageuse, puis m'enlaça. Je relâchai l'étreinte et continua mon chemin sans dire un mot, larmes aux yeux. Je me dirigeai vers la cour, pour prendre un peu d'air, et regarder les villageois de la cité de Mastaban se promener ou vendre leurs produits. Je m'assis sur un banc, et sécha mes larmes. Un coquelicot apparut devant moi, je levai la tête et vis Aeglos. Je le remercie et pris la belle fleur. Il s'assit à côté de rien sans rien dire. Nous regardâmes des personnes qui faisaient des va-et-vient. Nous vîmes de l'agitation dans le coin d'un groupe de stand. Nous nous regardâmes et décidâmes d'aller voir la situation. Des villageois couraient partout, effrayés, d'autres tentaient d'arrêter un objet ou un animal très petit qui faisait des dégâts. Je vis un reptile se faufiler dans un tonneau de pommes fraîches. Un vieil homme avait sorti son fusil et le dirigea. Un coup de feu retentit, le tonneau se brisa et des centaines de pommes tombèrent. La foule se calma.

    « D'où vient ce fusil ? cria le minotaure.

    ─ Un héritage ! s'énerva l'homme.

         Aeglos le confisqua.

    ─ Hé !

    ─ Je ferais rapport au Seigneur. »

        L'homme se tut. On dirait que même les armes humaines étaient interdites dans ce monde. Aeglos le cassa en deux, comme une brindille. « Non ! » cria celui-ci. Le vieil homme s'affola et se mit à ramasser les débris. Le mi-taureau se dirigea vers le tas de pommes. Par surprise, le reptile noir doté de minis ailes était encore vivant et fit voler les pommes, puis mordit le bras d'Aeglos. Le minotaure, qui semblait ne pas avoir mal de la morsure, prit le petit animal par le cou qui se débattit. Je reconnus le dragon que j'avais recueilli et me précipitai pour le prendre dans mes bras. Celui-ci se cacha sous mon t-shirt rouge, que j'avais changé la veille, tremblant comme un fou.

    « Ne vous inquiétez, c'est juste un bébé animal !» cria Aeglos.

        La foule, qui observait la scène, se dispersa. Le vieil homme s'enfuit, laissant derrière un regard méprisant. Le géant homme poilu s'approcha de moi et ajouta : 

    « Fais attention. Ces gens sont effrayés par les dragons. S'ils découvrent cela, c'est la panique totale. Il y aura des courageux qui viendront tuer le dragon.»

        Je hochais la tête et rassura le bébé reptile.  

    ─ En fait... pourquoi avez-vous accepté que je l'élève ? demandai-je.

    ─ Pourquoi on ne peut refuser le souhait d'un Élu.

    ─ Donc, par exemple, j'ai envie de manger des cerises, vous le ferez ?

    ─ Ce n'est pas pareil !

         Nous rigolâmes. Donc, nous Elus, étions-nous si importants ? Au point qu'on demande à ne pas refuser nos souhaits ? Nous manipulait-on, afin de satisfaire nos désirs et nous offrir une totale confiance aux gens qui n'auraient aucune pitié de nous ? J'eut beaucoup de doutes, derrière un rire.
         Nous retournâmes au petit château. Nous longeâmes les couloirs. Plus tard, je me retournai et ne vis plus le minotaure, peut-être était-il parti dans sa chambre. Le petit dragon sortit sa tête de mon t-shirt et me regarda avec ses yeux globuleux. 

    ─ Ce n'est pas bien ! murmurais-je. Les gens viendront te tuer si tu continues comme ça.

        Le bébé animal s'excita, heureux.

    ─ Non ! Il ne faut pas être content, sinon tu seras privé de lait ce soir.

       Il souffla un long soupir, et me regarda à nouveau. Je le cachai à nouveau dans mon t-shirt et sentit une main se poser doucement. Essayant de ne pas paraître quelqu'un qui cachait quelque chose, je me retournai en souriant.

    ─ A qui parles-tu ? me demanda la guerrière de bronze.

    ─ Non, ce n'est rien ! Je me disais juste des mots d'encouragements...

    ─ Ah, d'accord ! me sourit-elle.

       Puis elle continua son chemin. Je sentis le dragon bouger brusquement, et la femme se retourna, inquiète. Elle m'informa qu'elle avait entendu des couinements. Elle s'approcha vivement de moi et me demanda si je cachais quelque chose. Je lui confirmai que non, mais la vérité fut révélée : l'animal sortit sa tête et mordit le doigt de celle-ci très fort. Elle cria de douleur, son doigt saignait.

    ─ Qu'est-ce que c'est ça ! s'exclama-t-elle, énervée.

    ─ Mélodie, je vais t'expliquer ! 

        Je vis Aldaron et Aeglos, suivis d'un homme très costaud aux cheveux blancs tressé et très barbu, venir à la rescousse. Mélodie pointa du doigt l'animal qui le regardait et qui semblait se demander ce qu'elle avait : 

    ─ Où avez-vous récupéré cet animal ?!

    ─ Ce n'est encore qu'un bébé ! Nous allons t'expliquer la situation ! dit l'homme-taureau, en stoppant la guerrière enragée.

        Ils l'entraînèrent dans une chambre voisine. Aldaron ferma la porte à clé. Le petit dragon sortit de sa cachette et atterrit sur le parquet. Mélodie prit une position de défense et sortit une dague qu'elle portait sur elle. L'homme inconnu aux cheveux blancs bloqua son poignet. 

    ─ En fait, nous l'avons découvert après la guerre contre ces Kodoks, ajouta calmement Aldaron.

    ─ Et ? s'écria-t-elle. Risia, explique moi tout de suite ! 

    ─ N'agis pas comme cela devant elle, Guerrière de bronze.

    ─ En fait, je l'ai retrouvé près de moi, il semblait être rejeté. S'il te plaît, laisse moi du temps, je m'occuperai de lui, répondis-je.

    ─ Sais-tu qui il est vraiment ?!

    ─ Oui, mais je vais le changer ! 

       Un long silence dans la salle s'installait, et je ne sentais plus aucune vibration de son.

    ─ D'accord, mais je t'ai à l’œil, Risia, même si j'ai confiance en toi. C'est pour toi que je fais, si jamais il se retourne contre toi.

    ─ Tu décides vite... Ça restera un secret », finis-je.

       L'étranger lâcha Mélodie qui lui lança un regard noir. Elle rangea son dague et ouvrit la porte après avoir piqué les clés des mains d'Aldaron. L'homme géant sortit en premier, précipitamment.

    « Hé, attends ! s'écria la guerrière.

       Mais il avait déjà disparu. 

    ─ Qui est-il ? Demandai-je.

    ─ Je ne sais pas, me répondit l'elfe.

    ─ Moi non plus, dit à son tour l'homme mi-taureau.

    ─ Ni moi ! s'affola Mélodie.

    ─ Mais alors... gardera-t-il le secret ? m'exclamai-je.

       Tout le monde se regarda, confus. Puis nous nous sommes tout de suite mis à sa poursuite, avec le dragon qui semblait connaître le chemin par l'odorat.

    ─ Et mince, que faire si le Roi de Mastaban découvrait cela dans sa cité ?! s'énerva le prince.

        Nous courûmes comme si nous étions poursuivis. Après plus d'une heure, le dragon s'épuisa et s'affala contre le sol, ainsi que nous, essoufflés.

    ─ Bon sang, on est foutus ! », ajouta la femme blonde en frappant le sol avec son poing.

       Le bébé animal se dirigea vers moi et posa sa tête contre mon genou, qui semblait demander un pardon. Je lui caressai la tête, pour le rassurer. Le soir arriva, et le château semblait vide, comme si on préparait une surprise. Une surprise qui risquait de ne plaire à personne.

    **

    Risia : 

        J'étais toute excitée de pouvoir partager un grand repas ce soir, mais ce sentiment avait disparu depuis que nous nous sommes mis à la recherche  de cet homme aux cheveux tressés. Nous avions complètement perdu sa trace.

    « Ne t'inquiète pas, je suis sûr qu'il gardera secret », me dit Aldaron par la pensée.

       Tout le groupe, après avoir couru longtemps, se dirigea vers la salle du repas. Le dragon ronronnait comme un chat dans mes bras. Arrivés devant la salle, Mélodie et Aeglos ouvrirent en même temps les lourdes portes. Nous entrâmes. Émerveillée, je vis une très longue table en bois de chêne qui attirait toute l'attention au centre de la salle, des centaines de chaises l'entouraient. De géantes tapisseries royales ornaient les murs, il y avait de nombreux bouquets de fleurs prises avec soin dans des magnifique vases en porcelaine. Le seul décor qui cassait tout le charme de l'ambiance était une pauvre ampoule qui pendait au plafond par un fil de fer. Malgré la poussière et les toiles d'araignées qui l'entouraient, elle éclairait très bien la pièce. 

    « Pourquoi une ampoule ? demandai-je.

    ─ Ah ! Tu vois... me répondit Mélodie.

    ─ Le Troisième Monde a beau être coupé du Monde humain, et même encore le détester, mais il y aura toujours des malins qui réussiront à imiter la technologie humaine sans subir la colère des dieux, continua Aldaron.

    ─ Les dieux ne devaient-ils pas tout voir ? questionna Aeglos à Aldaron.

    ─ Peut-être qu'ils n'ont jamais existé.

    ─ Mais alors, le Troisième Monde ? », finit Mélodie.

        Ce fut le silence total. Aeglos partit prendre sa place sans aucun mot. Tout le monde fit la même chose. Il ordonna ensuite à une servante qui était présente en ces lieux, d'apporter une coupelle de lait.

    « Vous avez un chaton ? avait-elle demandé. Ou un chiot.

    ─ Oui, c'est pour lui, confirma le minotaure.

        Je cherchais partout des yeux un chat ou un chiot. Je ne le vis nulle part. Puis je croisai les yeux globuleux du dragon. « Ah c'est toi.», dis-je. Celui-ci m'observa longtemps avant de s'exciter avec joie.

    ─ Il a l'air content qu'on le confonde avec un chat », entendis-je dans ma tête.

       Je regardai Aldaron, il semblait être fatigué de voir cet enthousiasme. Je souris. Plus tard, après avoir partagé nos pains qui ont été apportés pour attendre le repas, je vis Sam arriver en boitant, l’œil gauche toujours recouvert d'un pansement. Une servante se précipita pour l'aider à s'installer à côté de moi. Assis, Sam me regarda et me demanda pourquoi je poussai des couinements. Je fis les gros yeux. Tout à coup, tout le monde rigola, moi et les servantes ne comprenions rien. Puis soudain, l'homme-chat fut attaqué en pleine figure par une boule bleu marine et pleine d'écailles, qui le fit tomber en arrière. Tout le monde rigola à nouveau. De peur que Sam ne sache pas le secret et qu'il paniquera aussi à son tour, je me précipitai pour séparer mon animal de lui. Mais la situation a pris le tournant. Le bébé dragon lui léchait les joues, heureux, ainsi que Sam qui s'amusait avec lui.

    « Sam, tu es courant ? m'exclamai-je.

    ─ Oui !  , me répondit-il en rigolant à nouveau.

    ─ Tu savais qu'il était un dragon ? demandai-je.

    ─ Non, je croyais que c'était un simple reptile...

    ─ Je croyais que tu le savais très bien, en fait tu es un idiot...» murmura Aldaron.

       Il y eut Aeglos qui s'excitait de la remarque d'Aldaron. Lorsque tout le monde s'est calmé et s'est rassit, le dragon se faufila entre les bras de Sam. Je restai bouche bée, ne comprenant rien, avec mes amis qui me dévisageaient avec un regard moqueur.

    « J'ai toujours voulu voir un dragon de près ! ajouta Sam.

    ─ Tu n'as pas peur ? lui dis-je en essayant de séparer Sam de l'animal à nouveau.

    ─ Je connais leurs histoires un par un. J'ai entendu des légendes sur eux. Beaucoup disent qu'ils sont mauvais, mais je sais qu'il y en a qui sont bons ! 

    ─ Comment sais-tu cela, Sam ? coupa Mélodie, soucieuse.

    ─ Mon père est monté sur un dragon lorsqu'il avait mon âge, murmura Sam. Il me racontait toutes ses aventures.

    ─ Ah, oui, ton père... »

        Tout le monde se tut, les yeux dans le vide, semblant se rappeler un passé heureux et douloureux à la fois. Mélodie a écarquillé les yeux, semblant se souvenir de quelque chose, mais elle avait de gros doutes. Puis la discussion continuait, je ne suivais plus son fil car ils discutaient tous en même temps et je n'entendais pas les mots, un gros inconvénient de ma surdité. Je plongeai dans mes pensées. Les dragons ont-ils vraiment disparu ? Puis le stress monta en moi. Que se passerait-t-il si les gens finissaient par apprendre l'existence de mon dragon? Je sentis une morsure sur mon bras. Je le retirai vivement. L'animal me regarda, bougeant sans cesse sa queue, comme un chien. Tout le groupe me regardait, chacun avait une assiette remplie de nourriture traditionnelle du royaume. Je regardai la mienne. Quelqu'un me tapota sur l'épaule.

    « Est-ce que tu vas bien ? me demanda Carl, apparut tel un ange.

           Enfin, il est certainement un ange, puisqu'il possède des ailes blanches et il était tombé du ciel...

    ─ Hum, oui.

       Je ne l'avais pas vu arriver, même le roi et sa famille y était présente. Je poussai un cri. Le roi ! Celeborn ! Le père de Celebrimbor ! De Debreorn !

    ─ Risia, est-ce que ça va ? me secoua Sam.

    ─ Le roi ! Le... r.. loi... ,bredouillai-je. Le.. fi.. fils... lit... mort... malda... malade...

    ─ Oui. Il sait tout. Il savait également pour le dragon. Quelqu'un lui a prévenu. On a une réunion avec lui après le repas, me dit le pince elfe,., je suis persuadé que c'est l'homme aux tresses qui était avec nous qui lui avait dit le secret.»

        Je commençai à manger, en évitant le regard de Sa majesté, de peur de voir sa colère se rejeter sur moi. Le repas finit, certains partirent, seuls Mélodie, Aldaron, Aeglos, Sam et moi restions avec Celeborn. Celui-ci me regardait comme si j'étais une enfant qui avait fait une bêtise, et qui allait être punie. Le dragon était toujours dans les bras de Sam, et il semblait avoir grossi et grandi à la fois. Le jeune homme châtain se tourna vers moi, regardant par terre et souriant, gêné. Il ignora les autres à côté de lui.

    « Risia, on peut lui donner un nom ?

    ─ Mais, euh, je, mais... on ne sait... on ne sait pas si c'est une fille ou un garçon...

    ─ Mâle ou femelle ? C'est une femelle. Je sais reconnaître le sexe, vu que ma curiosité m'a fait apprendre beaucoup de choses.

    ─ Ah...

    ─ Alors ?

    ─ Hum, herm, euh, je, oui... Un joli...

    ─ Je veux qu'on le choisisse ensemble.

    ─ Ah ? Euh, si tu veux...», bredouillai-je, contente qu'on me proposait une telle chose pour mon dragon, et le cœur qui battait si fort. Je ramassai une mèche de cheveux devant mon front.

    « J'exige des explications », coupa le roi, seigneur à la fois, coupant l'ambiance qui devenait plus joyeuse.

       Il nous fit signe de le suivre jusqu'au trône. Il s'assit. Tout le groupe s'agenouilla, je regardai la salle. Les soldats en armure d'argent, tels des statuts, longeaient un grand tapis bleu jusqu'à la géante chaise d'argent qui représentait des racines entremêlées. Il y avait des piliers en marbre, et le sol de la même matière. Un grand arbre, peint en blanc et gris, était visible à travers une géante fenêtre derrière le trône.

    « Élue humaine, expliquez-moi, m'ordonna Son seigneur.

    ─ Je... C'était pendant que ces géantes grenouilles avaient attaqué Mastaban.

    ─ Ensuite ?

       Mes amis me regardaient, m'encourageant de continuer à répondre.

    ─ Et bien, j'ai trouvé un bébé animal s'affaler près de ma jambe.

    ─ Puis ?

      Je fermai ma bouche, serrant les lèvres. La sueur me donna envie de me gratter la joue.

    ─ Je l'ai recueilli.

    ─ Pourquoi ?

    ─ Parce qu'il me semblait seul. J'avais pensé à Paul , qui était comme lui.

         Je reprenais mon souffle, cherchant les mots.

    ─ Il était un chiot que le maître du domaine, dans laquelle je le servais, l'avait recueilli, parce qu'il était seul, dans un carton, au bord d'une route.

    ─ Et sais-tu quel est cet animal ?

    ─ Un... un dragon.

    ─ Et sais-tu ce que c'est un dragon ?

    ─ Oui.

    ─ Non, tu ne le sais pas.

       Sam se releva brusquement, genoux toujours à terre : 

    ─ Mais sire ! Pas tous les dragons sont mauvais ! Certains sont bons ! 

    ─ Ferme-la ! cria Mélodie qui le fit se courber si fort que celui-ci se cogna la tête contre le tapis.

    ─ Soldats, détruisez le dragon ! hurla Celeborn.

    ─ Non ! Je l'élèverai ! Je prends la responsabilité ! m'affolai-je.

    ─ On ne discute pas !

    ─ ...Sire, on dit que si un Élu fait fait un choix, s'il est persuadé, c'est qu'il ne se trompe pas, on ne peut le contredire ! », hurla à son tour Aldaron, mains sur le genoux, les yeux plissés très fort.

       Les soldats avancèrent vers nous, Mélodie et Aeglos leur firent obstacle. Celeborn semblait réfléchir, main sur le menton, coude sur le bras du trône, jambes croisées, les cheveux blancs sur ses épaules. (Note de l'auteur : Oui, j'aime tout décrire)

    « Stop ! 

       Les soldats revinrent à leur place. Le seigneur quitta sa chaise royale, et avança vers moi.

    ─ As-tu dis que tu l'élèveras ?

    ─ Oui...

    ─ J'aimerai refuser, mais j'ai vécu plusieurs fois l'expérience d'avoir refusé le choix d'un Élu. La colère me tombait dessus.

    ─ Haha, oui, je me souviens de l'autre fois où tu étais pris dans la boue et..., commença Mélodie, essayant de changer de sujet.

         Le Seigneur lui fit signe de se taire. Malgré son visage rude, il semblait pris de honte.

    ─ Le Prince a raison. Mais. Une seule erreur. On le détruit.

    ─ Mais vous venez de dire...

    ─ Partez.

       Puis il quitta la salle. Tous mes amis et moi restions bouche bée, les soldats étaient de marbre. On a encore accepté un de mes souhaits. Le doute du fait qu'on remplissait nos désirs pour nous utiliser augmentait encore. Je levai les yeux vers le plafond, me demandant la vraie raison. Puis Sam s'exclama, joyeux :

    ─ Par mes oreilles de félin, il a dit oui ! 

    ─ Et bien, tu entends très bien mon gros chat, adressa-t-il Aeglos.

    ─ Je ne suis pas un chat ! 

       Tout le monde se détendit, rassuré. Je souris, heureuse, jusqu'à même avoir les larmes qui roulèrent sur mes joues.

    ─ Hé, ne pleure pas ! C'est finit ! me cria Sam, en me caressant la tête. 

       Le dragon, qui semblait de nouveau avoir grossi et grandi, ne pouvait plus stopper ses gestes excités. Aldaron tenta de le calmer. Mais l'animal courut et sortit de la salle.

    ─ "Une seule erreur, et on le détruit", répéta Aeglos, poussant un soupir.

    ─ Mais elle va où la dragonne ? demanda Mélodie.

    ─ .... vers la ville », finit Aldaron.

    **

    Aldaron :

       Alors, les dragons n'avaient pas disparu pour de bon. C'était depuis la fin de cette grande Guerre que je n'avais plus jamais entendu parler de cette race, ni vu une dernière fois voler librement dans le ciel, ni nager dans les eaux brillant au soleil, ni parcourir les forêts dont la tête dépassait les plus grands sommets des arbres. Certains pouvaient cracher du feu, d'autres manier les plantes, la terre, les eaux, ou même le vent. Les dragons étaient les maîtres de la Nature. Ils été aimés, craints et respectés. Jusqu'au jour nous les vîmes plus. Ils ont marqué le dernier jour de la Guerre dan les Histoires. De nombreux aventuriers étaient partis à leur recherche, mais en vain. Personne ne savait ce qu'il s'était passé ce jour-là. Et aujourd'hui, il fallait que ça tombe sur une Élue, Risia. Retrouver un dragon. Certainement le dernier des dragons, puisque ce stupide homme-chat m'avait expliqué que les œufs pouvaient rester non-éclos pendant plusieurs années.

        Nous parcourûmes la ville. Nous décidâmes de nous séparer pour faciliter les recherches. Mélodie partit avec Risia, Aeglos avec Carl qui était venu nous aider, et moi avec... Sam. Nous observions chaque coin. L'homme châtain et moi nous disions rien. Je regardai le fond d'un tonneau, et vit plusieurs pommes dévorées à moitié. Peut-être que cette dragonne était passé par là.

    « Hé, m'interpella Sam.

       Je fis la sourde oreille.

    ─ Ne fais pas le sourd.

    ─ Quoi ? Que veux-tu me dire ?

    ─ Euh... non, oublie.

        Je ne bronchais pas, continuant ma recherche. J'entendis un cri. Sam prit rapidement sa forme féline, oreilles de chat de gouttière et queue inutile. Il courut en direction du cri. Je le suivi. Deux enfants étaient près d'un mur, se demandant pourquoi étions-nous là. L'homme-chat s'approcha et s'agenouilla pour leur poser des questions.

    ─ Un animal aux écailles et bleu marine ? Rien vu, monsieur ! répondit la petit fille aux grands yeux et aux cheveux dorés.

    ─ Et pourquoi avez-vous couru ? demanda le grand frère aîné, parfait sosie de sa sœur.

    ─ Parce que nous avons entendu un cri, leur dis-je.

    ─ Ah, c'est parce que j'ai fait une blague à ma sœur.

    ─ Et ce n'était pas drôle !

    ─ D'accord, merci, leur sourit Sam. 

        Nous partîmes. Nous croisâmes Mélodie et Risia. 

    ─ Alors ? nous demanda la guerrière.

    ─ J'ai trouvé un tonneau avec des pommes à moitié mangées, répondis-je.

    ─ Je crois que c'est toi qui ai fait ça, me provoqua Sam.

    ─ Hé.

    ─ Je suis sûr que c'est une excuse.

    ─ Je suis persuadé que c'est la dragonne qui était passé par là.

    ─ Ah oui ?

    ─ Euh... tu l'as vue ?, nous coupa Risia, qui visiblement semble ne pas avoir suivi notre dispute.

    ─ Risia, non. Et je ne supporte pas d'être avec cet elfe, ricane l'homme-chat, en s'approchant. Il mit son bras autour de ses épaules.

    ─ Je suis un Prince, idiot de chat.

    ─ Un prince sans royaume. Le survivant!

       Mélodie prit un coup de colère et nous donna à chacun un coup de poing sur la tête.

    ─ Sam, va avec Risia, je vais avec Aldaron, s'exclama-t-elle.

    ─ J'ai gagné., m'envoya Sam en me tirant la langue.

    ─ Tu veux que je te la coupe ? », hurla la guerrière.

       Sam et Risia ont sursauté, surpris. Mais moi, j'avais vu pire, je m'attendais à sa réaction. Le problème étant réglé, nous nous séparâmes de nouveau. Plus tard, Mélodie m'adressa la parole : 

    « Mais quel est le problème entre vous deux ?

    ─ C'est lui qui me provoque.

    ─ Oh, vous vous disputez pour elle ? ricana-t-elle.

    ─ C'est bon, ça va.

    ─ Oh, le petit elfe est jaloux parce qu'il n'a pas pu venir avec son amie, m'embêta-t-elle en jouant avec mes joues.

    ─ C'est bon ! m'énervai-je.

        La femme blonde poussa un rire, main sur le ventre. Sa colère semblait être partie. Plus tard, nous aperçûmes une ombre défiler à grande vitesse.

    ─ Là-bas ! cria-t-elle.

       La dragonne courrait, désorientée, mais cette fois-ci elle possédait des ailes encore plus larges et elle était plus grande que la hauteur d'un balai.

    ─ Oh non ! On va la voir ! 

       Nous courûmes pour l'attraper, mais celle-ci prit peur, et fuit vers les champs pour se cacher dans une botte de foin. Mélodie m'ordonna de la surveiller, le temps qu'elle aille chercher les autres. Lorsqu'elle fut partie, je m'approchai de la dragonne. 

    ─ Hé.

       La botte de foin tremblait.

    ─ Ne t'inquiète pas, c'est moi, un ami de Risia, lui dis-je dans ma langue elfique.

       Une tête sortit. Des épines apparaissaient le long de sa mâchoire, elle avait des oreilles pointues, ses yeux avaient la même couleur que ses écailles. Ses cornes allaient vers le ciel, mais restaient assez petits.

    ─ Nuuuuuh?, poussa-t-elle.

    ─ Oui tout va bien, essayai-je de la calmer, en bougeant avec douceur mes mains.

    ─ Ah ben, ça alors ! C'est un dragon du vent ! »

       Je me retournai vivement. Je vis un vieil homme courbé. Il portait une grande robe bleue turquoise, une très longue barbe blanche soignée et une couronne de cheveux sur la tête, des oreilles décollées, un gros nez. Il tenait dans sa main un bâton blanc transportant une pierre noire.

    « Qui êtes-vous ?

    ─ Moî ! Je n'ai pas arrêté de vous observer, depuis que Sa majesté m'avait dit qu'il y avait un dragon ! J'ai eu peur qu'il avait perdu la tête, j'étais venu vérifier.

    ─ Le magicien de Mastaban ? Le plus vieux des magiciens ?

    ─ Mais oui, mais oui.

        Je fus surpris de le rencontrer pour la première fois. Ce célèbre magicien qui était connu pour sa longévité, sa sagesse, ses connaissances et aussi le fait, normalement, qu'il ne quittait jamais sa tour derrière le château ! C'est aussi grâce à lui que Mastaban est si bien protégé ! Je fis une révérence.

    ─ C'est bon, mon petit, relevez-vous.

     ─ Magicien Môi ! Je...

       Je l'imaginai plus droit et ayant un caractère plus fort. Peu de personnes connaissent son âge précis.

     ─ Un dragon du vent ! Ses écailles solides qui fendent le vent pendant son vol, des ailes robustes, un corps costaud, une vision d'aigle, une forte mâchoire, des oreilles qui peuvent entendre le moindre son comme les elfes... Tu étais donc un dragon du vent ! parlait seul Môi.

       Le magicien s'approcha de la dragonne et lui caressa la tête. Celle-ci ronronna comme un chat.

    ─ Dire que tu étais un œuf quand je t'ai retrouvé. J'ai cru que tu étais un œuf d'autruche échoué sur la rivière. J'allais te faire cuire.

    ─ D'... d'autruche ? me retins-je de rire.

    ─ Woa ! 

        Je vis Risia et les autres arriver en courant, émerveillés.

    ─ Ça alors ! Un dragon du vent ! s'exclama Sam.

    ─ C'est toi ? demanda Risia.

       Tout à coup, Aeglos, Mélodie et Carl firent une révérence, les deux autres imitèrent, ne comprenant pas à qui ils devaient faire ça. Des gens passaient par là, comme s'ils nous voyaient pas.

    ─ Môi, qu'est-ce que vous avez fait ?

    ─ Je nous ai cachés, sourit-il.

    ─ Merci pour votre aide...

    ─ Môi, grand magicien, cela fait longtemps, murmura Mélodie.

    ─ Le grand magicien Môi ? s'exclama Carl.

    ─ Ah, mes fameux guerriers ! s'exclama-t-il, ignorant mes paroles. La guerrière de bronze, le minotaure de fer ! Par contre toi, à la cape bleue, je ne te connais pas.

        Carl tira une tête de dégoût.

    ─ Oh! Le fils du docteur Faer ! Je t'ai vu encore bébé, tu es devenu un bel homme ! 

       Sam ne semblait ne pas se souvenir du magicien, mais fut flatté.

    ─ Une humaine.

       Tout le monde regarda Risia, qui ne comprenait toujours pas la situation. 

    ─ C'est le deuxième humain que je vois à Mastaban.

    ─ Pardon ? dis-je.

    ─ Franchement, la frontière entre nos deux Mondes commence à s'affaiblir. »

    **

    Risia :

       Le soir tomba. Tout le monde rentra à l'auberge, je restai avec le magicien Môi, sur sa demande, auprès d'une écurie. Nous nous assîmes sur un tronc d'arbre coupé. Mon animal fit connaissance avec les poneys et les chevaux, et semblait s'amuser.

    « Comment t'appelles-tu, mon enfant ?

    ─ Euh... excusez-moi, je suis sourde, j'ai besoin que vous articulez plus.

    ─ D'accord, il n'y a pas de problème. Peux-tu me donner ton nom ?

    ─ Risia. Risia Povfiy.

    ─ Je suis Môi. Tu me connais.

    ─ N... non, pas du tout.

    ─ Très peu de gens ne me connaissent pas, même s'ils ne m'ont jamais vu. Et peu connaissent mon vrai nom. 

    ─ Ah, Môi n'est pas votre nom ?

    ─ C'est un nom donné par le peuple.

       Tout à coup, la dragonne défila devant nous à une vitesse folle et se cacha dans une botte de foin.

    ─ Qu'est-ce qu'elle fait ? demandai-je.

    ─ Elle s'amuse tout simplement, elle ne se rend pas compte que les chevaux ne peuvent sortir de leur box.

       Celle-ci sortit la tête, guettant le moindre geste, et quitta sa cachette en courant à nouveau. Une rafale de vent nous attaqua doucement.

    ─ Et elle ne se rend pas compte qu'elle contrôle le vent inconsciemment, rigola le magicien. Mais ce n'est pas dangereux là.

    ─ Comment l'avez-vous trouvée ?

    ─ Mon enfant, je l'ai trouvé près d'un rivière. La rivière porte le nom "la rivière des galets", qui provient de ces montagnes rocheuses.

       Il pointa du doigt vers une direction précise. Le plafond magique de la ville avait certaines parties qui révélaient le vrai ciel. Je vis des montagnes grises de loin, sous le ciel étoilé, décorées de neige, comme du sucre glacé.

    ─ Elle était encore un œuf, elle était glacée.

    ─ Vous pensez qu'elle a été transportée par les courants ?

    ─ Oui. Il doit certainement avoir des nids de dragons dans ces montagnes, mais qui ne sont pas franchissables. Peut-être que ta dragonne est une des survivants de ces dragons disparus. Et peut-être, quand elle aura bien grandi, elle pourra nous emmener trouver d'autres dragons, finit-il par des gestes hésitants. 

    ─ C'est super ça ! 

    ─ Le problème, est de savoir comment réagiront ces dragons Il y en a certainement déjà qui ont atteint l'âge adulte.

       Le gros reptile vint se cacher derrière moi et me réclama une petite caresse sur ses naseaux. Je le fis.

    ─ Est-ce que... vous pouvez me raconter sur les humains qui étaient là avant moi ?

    ─ Bien sûr. Sache qu'avant la création du troisième monde, les humains cohabitaient avec les êtres magiques. Après être séparés, les humains construisirent un nouveau monde, dans lequel ils vivaient avec les êtres magiques : le Monde des humains, ou encore "continent Eulivia". Une ville porte le même nom, c'est là-bas que tu es née. La forêt que tu avais traversée était, si tu veux, un portail entre nos deux mondes.

    ─ Mais je l'ai traversé si facilement.

    ─ Peut-être avais-tu détruit une partie de la barrière sans te rendre compte. Ou bien elle avait déjà était détruite. Par le premier être humain normal qui était venu dans notre monde. Celebrimbor est l'un de ses descendants.

    ─ La barrière ? Je ne la vois pas. Celebrimbor est-il donc un mi-humain ?

    ─ Elle est invisible aux yeux d'autrui, cela est tout à fait normal. Je t'expliquerai quand tu auras acquis des connaissances en magie. Et oui... Mais je ne sais pas s'il voudrait que tu saches cela.

    ─ Ah d'accord... Des connaissances en magie ?

    ─ J'ai pour ordre, comme tout autre magicien, d'enseigner à un Élu mon savoir. Mais il est encore trop tôt pour toi et pour le fils de Celeborn.

    ─ Celebrimbor... J'espère qu'il va bien.

    ─ Je l'ignore, je ne l'ai vu que quand il était encore un bébé.

    ─ Vous êtes au courant de ce qu'il lui était arrivé ?

    ─ Oui, je viendrai le voir demain.

    ─ C'est rassurant que vous soyez un magicien, vous pourrez peut-être le sauver. Ah, et quand vous aviez parlé de la barrière qui fut détruite par le premier humain, vous parlez du chevalier qui était mort dans cette forêt ?

    ─ Oui. Il n'était pas mort. On le pensait disparu, mais en réalité il était "tombé" par accident chez nous.

    ─ Il était un Élu ?

    ─ Oui, seuls les Elus sont capables de traverser le portail.

    ─ Et Aldaron serait-il un ?

    ─ Il était un Élu. Il était encore un enfant, il avait peur de la guerre lorsqu'elle avait débuté. La guerre étant fini, tous les Elus ont perdu leurs pouvoirs qui leur servaient à se battre. Tu l'as rencontré quand il était un adolescent.

    ─ Mais Paul est un chien ! 

    ─ Ah ! Ce chien ! Qu'est-ce qu'il aimait me lécher !

    ─ Pardon ? Vous nous avez déjà rencontré ?

    ─ Oui, comme il était à tes côtés, tu lui as permis de traverser le portail. Et c'est moi qui ait dit à Aldaron de s'occuper de toi, parce que j'ai senti que tu n'étais pas là pour rien. Mais ensuite, tu étais décédée sous les yeux d'Aldaron, à cause de la flèche empoissonnée que son père t'avait envoyée.

       Je restais bouche bée. J'étais morte ? Suis-je devenue un fantôme ?

    ─ C'était son père ?!

    ─ Oui, il était le frère du roi. Aldaron était devenu l'héritier du trône.

    ─ Mais son royaume a disparu.

    ─ Il a été consumé par les flammes noires de l'Empire Perdu. Sa sœur, lui et un autre elfe étaient les seuls survivants, il n'étaient encore que des adolescents.

    ─ Vous en savez tant ! Parlez-moi de l'Empire ! 

     ─ Grounw ! poussa la dragonne.

    ─ Ton amie ne veut pas entendre parler de l'Empire.

    ─ Mais... tu n'étais encore qu'un œuf...

    ─ Risia, j'ai vu que le fils du docteur Faer a de grandes connaissances sur les dragons, tu pourras lui demander, il sera très heureux de t'en parler.

    ─ D'accord.

    ─ Et mon retour ? Comment ai-je fait pour revenir ? Je suis censée être morte, non ?

    ─ Par contre là, j'ignore comment tu as fais. Peut-être que les cieux t'ont donnée leur bénédiction.

    ─ C'est incroyable... Mais pourquoi les Elus sont-ils revenus ? 

    ─ Je ne peux t'expliquer, c'était la décision du Monde des Cieux.

    ─ Et... comment savez-vous autant sur moi ? »

       Il ne dit plus rien. Il me répondit que j'en saurais plus plus tard, et que la priorité est de voir Celebrimbor. Je le remerciai d'avoir été présent pour me raconter beaucoup de choses, même si il y a beaucoup de mots qui m'avaient échappée à cause de ma surdité. C'était vraiment une personne pleine de savoir, de connaissances. Je me retournai pour appeler la dragonne qui était partie un instant, boudeuse. Lorsqu'elle revint toute joyeuse et un peu fatiguée, je voulais poser une autre question à Môi, mais il avait disparu.

    « Quel homme incroyable. Maintenant, j'ai encore plus envie de connaître le passé. »

    **

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